2020 Entre Orient et Occident : trois églises peintes par des familles grecques en Crète, à Chypre et à Rhodes (XIVe-XVe siècle) Nationalité: France
Catégorie: Histoire de l’art médiéval
Présentation de la recherche

La recherche a pour but d’une part d’appréhender la manière dont les commanditaires ont utilisé l’image religieuse pour exprimer leur piété, leurs valeurs et leurs identités sociales et culturelles, et d’autre part de mettre en évidence des échanges artistiques qui ont eu cours en Méditerranée entre la fin du Moyen Âge et le début des temps modernes. Elle remet davantage en cause le classement conventionnel, et aujourd’hui dépassé, entre les arts d’un Orient et d’un Occident antagoniste et étanche et souligne la perméabilité de codes visuels issus de diverses traditions dans trois milieux multiethniques et multiconfessionnels comparables : Chypre franque, la Crète vénitienne et Rhodes hospitalière.

Pour cela, une analyse du décor peint de trois églises fondées entre la seconde moitié du XIVe et la fin du XVe siècle par des familles grecques à Chypre, en Crète et à Rhodes est effectuée. Entre le temps des croisades et la fin de la présence politique latine en Orient, ces trois grandes îles de la Méditerranée orientale ont bénéficié d’un important brassage culturel. Anciens territoires de l’Empire byzantin, elles ont été respectivement conquises par les Francs, les Vénitiens et les chevaliers de l’ordre de l’Hôpital Saint-Jean de Jérusalem en 1191, 1204 et 1306. Ces îles ont été gouvernées par les Latins jusqu’aux conquêtes des Turcs ottomans aux XVIe et XVIIe siècles. Durant l’occupation franque de Chypre, vénitienne de la Crète et hospitalière de Rhodes, les Grecs constituaient toujours la majorité de la population locale. Préservant leur identité, ils n’ont cessé de se considérer comme des membres de l’œkoumène byzantin. Ils ont gardé leur langue, leur mode vestimentaire, leur culture écrite, leur foi et leurs pratiques liturgiques et cultuelles, comme le culte des icônes, marqueur d’identité orthodoxe. Néanmoins, l’attachement des Chypriotes, des Crétois et des Rhodiens à la culture byzantine et aux traditions locales ne les a pas empêchés de s’ouvrir aux apports extérieurs.

L’étude est consacrée au décor peint de Sainte-Pélagie à Ano Viannos en Crète (1360), celui de l’Archange-Michel à Pedoulas à Chypre (1474) et celui de Saint-Nicolas à Phountoukli à Rhodes (1497-1498) ; trois monuments précisément datés par inscription et situés en milieu rural. Elle révèle que ces peintures représentent des témoins particulièrement éloquents de la culture des commanditaires grecs vivant dans d’anciens territoires de Byzance placés sous autorité latine ; une culture entre tradition et innovation qui méritait d’être analysée sous un angle comparatiste.

Biographie

Après une licence en Histoire de l’art et Archéologie à Aix-Marseille Université, Geoffrey Meyer-Fernandez a intégré le parcours de master « Arts et Archéologie du Moyen Âge, Arts des mondes byzantin et musulman » de cet établissement. Il a effectué sa première année de master à l’Université de Chypre (Πανεπιστήμιο Κύπρου) dans le cadre du programme européen Erasmus. Son mémoire, mené sous la direction d’Andréas Nicolaïdès et soutenu en 2013, a pour titre : « Les icônes du XIIIe siècle en Chypre ». Geoffrey M.-F. a poursuivi ses recherches sur la production picturale du royaume franc de Chypre dans le cadre d’une thèse de doctorat menée au sein de l’École Doctorale « Espaces, Cultures, Sociétés » d’Aix-Marseille Université (ED 355). Rattaché au Laboratoire d’Archéologie Médiévale et Moderne en Méditerranée (LA3M), ce travail a été financé par un contrat doctoral du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et par une bourse de la Fondation A. G. Leventis. La thèse, intitulée « Commanditaires et peintres à Chypre sous les Lusignan (1192-1474) : images d’un royaume multiculturel » et soutenue en 2019, traite de la peinture de l’île à travers le phénomène de la commande. Elle a été dirigée par Véronique François et Andréas Nicolaïdès et a bénéficié de deux bourses de recherche de l’École française d’Athènes (2015 et 2016). Geoffrey M.-F. a reçu le Prix du « Best Student Paper in History of Art » lors de la Second Conference of Byzantine and Medieval Studies qui s’est tenue à Nicosie en janvier 2018. Décernée par le Scientific and Organizing Committee de la Byzantinist Society of Cyprus, ce prix a distingué une communication au cours de laquelle il avait présenté un aspect de ses recherches doctorales. En 2017, il a été sollicité en tant qu’expert pour mener une étude sur le décor peint de l’ancienne église des Hospitaliers à Abu Gosh (Israël), dans le cadre de la mission Abu Gosh 2016-2018 du Laboratoire d’Archéologie Médiévale et Moderne en Méditerranée. Associé à ce laboratoire depuis la soutenance de sa thèse, il a intégré l’École française d’Athènes en septembre 2021 en tant que membre scientifique de la section des études modernes et contemporaines. Son projet de recherche a pour titre : « Témoins d’un monde en transition : les peintures dans les pays grecs sous autorité latine au XIIIe siècle ». Ce dernier aspire à contribuer à notre connaissance du monde grec au lendemain des conquêtes croisées de la fin du XIIe et du début du XIIIe siècle. Ce travail documente, analyse et interprète les portraits et inscriptions à caractère dédicatoire, votif et commémoratif ainsi que les blasons armoriés peints au XIIIe siècle dans les territoires de l’Empire byzantin sous gouvernance latine. Une enquête comparatiste, approfondie, contextualisée et pluridisciplinaire conjuguant l’histoire de l’art à l’archéologie, à l’épigraphie et à la prosopographie est menée sur ces témoins picturaux afin d’appréhender les changements qui ont eu cours en Méditerranée durant cette période de transition. Elle permettra d’évaluer et de comprendre les transformations du monde byzantin et l’émergence de la « francocratie ». Membre élu de plein droit du Comité Français des Études Byzantines (CFEB) depuis février 2020 et membre actif du Centre d’Études Chypriotes depuis janvier 2021, Geoffrey M.-F. continue en parallèle à collaborer à des projets collectifs de recherche consacrés à l’art de l’Orient méditerranéen à l’époque des croisades. Depuis septembre 2021, il s’implique aussi dans l’édition scientifique en tant que membre du Secrétariat de la rédaction de la revue Bulletin de Correspondance Hellénique moderne et contemporain.

Résultats de la recherche

Publications :

  • Geoffrey Meyer-Fernandez, « Entre Orient et Occident : le décor peint de trois fondations grecques en Crète, à Chypre et à Rhodes (xive-xve siècles) », Bulletin de Correspondance Hellénique 145(2), École française d’Athènes, Athènes, 2021, p. 675-773.

    Résumé :

    De l’époque des croisades à la fin de la présence politique latine en Orient, Chypre, la Crète et Rhodes ont bénéficié d’un important brassage culturel. Intégrées aux routes maritimes reliant les ports d’Orient à ceux d’Occident et accueillant des populations cosmopolites, ces îles de l’Empire byzantin sont passées respectivement sous le contrôle des Francs, de Venise et des Hospitaliers en 1191, 1204 et 1306. Durant la domination franque de Chypre, vénitienne de la Crète et hospitalière de Rhodes, les Grecs constituaient toujours la majorité de la population locale. Préservant leur identité, ils n’ont cessé de se considérer comme des membres de l’oikouméne de l’Empire romain d’Orient. Néanmoins, leur attachement à la culture byzantine et à leurs propres traditions locales ne les a pas empêchés de s’ouvrir aux apports extérieurs.

  • Geoffrey Meyer-Fernandez (article à paraître dans Cahiers du Centre d’Études Chypriotes), « Construire son église à la fin du règne des Lusignan : l’Archange-Michel de Pedoulas (1474) ».

Communications :

  • 19 novembre 2021 : « Construire son église à la fin du règne des Lusignan : l’Archange-Michel de Pedoulas (1474) », Conférence annuelle du Centre d’Études Chypriotes présidée par Sabine Fourrier (Présidente du Centre d’Études Chypriotes – Laboratoire HiSoMA), en vidéoconférence.
  • Recherches postdoctorales entre Chypre, la Crète et Rhodes à la fin du Moyen Âge », Dialogues byzantins de l’Association des étudiants du monde byzantin organisé par Nicolas Varaine (Institut national d’histoire de l’art – INHA), Maria Chronopoulou (École Pratique des Hautes Études) et Elizabeth Zanghi (Université Paris-Sorbonne, Paris IV), Association des étudiants du monde byzantin (AEMB), en vidéoconférence.
  • 22 mars 2021 : « Recherches postdoctorales entre Chypre, la Crète et Rhodes à la fin du Moyen Âge », Dialogues byzantins de l’Association des étudiants du monde byzantin organisé par Nicolas Varaine (Institut national d’histoire de l’art – INHA), Maria Chronopoulou (École Pratique des Hautes Études) et Elizabeth Zanghi (Université Paris-Sorbonne, Paris IV), Association des étudiants du monde byzantin (AEMB), en vidéoconférence.
  • 25 février 2021 : « Entre Orient et Occident : trois églises peintes par des familles grecques en Crète, à Chypre et à Rhodes (XIVe-XVe siècle) », Atelier du domaine de recherche Histoire de l’art du IVe au XVe siècle dirigé par Isabelle Marchesin (Université de Poitiers, INHA), INHA, Département des Études et de la Recherche, en vidéoconférence.
  • 9 décembre 2020 : « Entre Orient et Occident : trois églises peintes par des familles grecques en Crète, à Chypre et à Rhodes (XIVe-XVe siècle) », Archéologie religieuse du monde byzantin et Arts chrétiens d’Orient dirigé par Ioanna Rapti (École Pratique des Hautes Études), Université Paris I-Sorbonne, EPHE, 9 décembre 2020, en vidéoconférence.

Logo de la présentation : Détail du templon de l’église chypriote de Pedoulas (1474). © Geoffrey Meyer-Fernandez